01 février 2007

L'urgence de la fraternité

Dans une récente conférence organisée au Sénat par le collectif "Appel à la fraternité" le 30 novembre 2006 le sociologue Edgar Morin, qui ne s'exprime plus que très rarement, a notamment déclaré ce qui suit :

Je crois que le plus urgent dans le tryptique liberté, égalité, fraternité, c'est la fraternité. En incitant à reconnaître les différences d'idées, d'opinions, de comportements d'autrui, tout en reconnaissant que nous sommes tous de la même espèce, la fraternité favorise la liberté. Mais elle favorise aussi l'égalité, car elle nous oblige à lutter contre les inégalités, au moins les plus criantes. Il nous faut donc examiner sous tous ses aspects, les façons de régénérer la fraternité, puisque nous en avons non seulement la nécessité, mais les virtualités.
Je crois qu'un mouvement en France qui montrerait, non par des promesses, mais par l'affirmation qu'il y a une voie pour s'en sortir, une voie solidaire, offrirait un espoir, un élan.
Je crois aussi que cela nécessitera beaucoup d'efforts, de prise de conscience, car on recherche une réforme de vie, une réforme éthique.
Je précise par ailleurs que les différentes fraternités ne doivent pas être considérées comme antagonistes. La fraternité que l'on a pour les nôtres, les proches ; la fraternité que l'on ressent en tant que membres de la même patrie ; la fraternité qu'il faudrait restituer entre européens ; et la fraternité humaine, plus large... Toutes ces fraternités sont complémentaires et peuvent se féconder les unes les autres, à la condition que nous comprenions cette idée très simple, mais néanmoins à admettre : le respect de l'unité dans la différence et de la différence dans l'unité.
Mise à part l'idée exposée à la fin qui me tarabuste un peu - il va falloir que j'y réfléchisse plus tard - ce plaidoyer pour la fraternité, assez à contre-courant de l'air du temps, me séduit beaucoup. Il est souvent difficile de caractériser la "fraternité" - mot-valise comme "liberté" et "égalité", mais pas seulement, dans lequel on peut mettre à peu près ce que l'on veut - contrairement aux deux autres termes de la devise de la République Française, difficile d'en expliciter les mécanismes, les fondements. Edgar Morin, à mon sens, donne ici une conception renouvelée et pragmatique de cette notion.

J'y décèle toutefois comme une hésitation à la fin de l'énumération des fraternités ("de la même patrie, [...] entre européens, [...] humaine, plus large..."). J'avoue ne pas bien comprendre ce complément "incomplet" : "plus large...". Que veut dire E. Morin? Que la fraternité humaine est réductible ? Qu'on ne peut en définir les limites ?

Il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'un appel à l'action pour la fraternité, les fraternités qui vient rafraîchir l'air nauséabond de cette campagne (quel nom, tout de même, pour un événement qui est tout sauf campagnard!!)

2 Comments:

Le CPE said...

Bien agréable de voir des gens 'connus' tenir des discours qui vont à contre-courant du cloaque nauséabond dans lequel nous vivons trop souvent.

Merci pour ce rafraichissement

Maria-Dolores said...

Oui, le cpe, j'aime bien E. Morin et je trouve que cette intervention méritait d'être soulignée car on débat souvent de l'égalité et la liberté, qui ont quand même leur place dans cette devise que le monde entier nous envie ;-) , mais c'est beaucoup plus rare et difficile de disserter sur la fraternité.

Es-tu vraiment C.P.E. (conseiller principal d'éducation -nationale-) ou c'est juste un pseudo?

 

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